{"type":"Feature","properties":{"id":10888,"name":"Chiesa di San Pietro","description":"
La chapelle Saint Pierre est l\u2019une de celles, innombrables, qui jalonnaient les routes du Moyen Age. Elles offraient aux voyageurs un lieu de recueillement en m\u00eame temps qu\u2019un abri pour se reposer, d\u2019o\u00f9 ce portique recouvrant le chemin. Mais, lorsqu\u2019elles \u00e9taient, comme c\u2019est le cas de San Pietro, implant\u00e9es \u00e0 port\u00e9e de vue du village, ces sanctuaires formaient aussi une sorte d\u2019enceinte spirituelle prot\u00e9geant les habitants de la communaut\u00e9 contre tous les dangers ext\u00e9rieurs. Enceinte spirituelle qui, lorsque la peste mena\u00e7ait, se transformait en un v\u00e9ritable poste de garde, o\u00f9 l\u2019on controllait l\u2019acc\u00e8s au village…<\/p>\n
C\u2019est en 1486 que Ludovic II, marquis de Saluces, fit am\u00e9nager la route m\u00e9di\u00e9vale de la vall\u00e9e Maira. Peut-\u00eatre la chapelle San Pietro existait-elle d\u00e9j\u00e0 auparavant, mais c\u2019est \u00e0 ce moment l\u00e0 – cette fin du XV\u00e8me si\u00e8cle fut l\u2019\u00e2ge d\u2019or de toute la contr\u00e9e – qu\u2019elle re\u00e7ut sa d\u00e9coration, \u00e0 commencer par les quatre petits pinacles gothiques pos\u00e9s aux quatre coins de la toiture. C\u2019est aussi \u00e0 cette date qu\u2019elle fut orn\u00e9e de peintures par un artiste local, Thomas de Biasacci, \u00e9tabli dans la petite ville de Savigliano. Il exer\u00e7a dans toute la r\u00e9gion entre 1455 et 1465, mais travailla \u00e9galement sur la c\u00f4te Ligure, dans la r\u00e9gion d\u2019Albenga et d\u2019Imp\u00e9ria. La date \u00e0 laquelle il d\u00e9cora la chapelle San Pietro est en partie effac\u00e9e, mais l\u2019oeuvre est bien sign\u00e9e du nom du peintre (qui exer\u00e7ait d\u2019ailleurs avec son fr\u00e8re).<\/p>\n
L\u2019oeuvre peinte de Thomas de Biasacci
\nL\u2019ext\u00e9rieur :
\nSur le mur Ouest, celui qui fait face au village de Macra, figurait un Saint Christophe, le patron des voyageurs. La fa\u00e7ade est le seul \u00e9l\u00e9ment d\u2019architecture qui ait \u00e9t\u00e9 modifi\u00e9. En effet, \u00e0 l\u2019origine, cette fa\u00e7ade n\u2019\u00e9tait pas ferm\u00e9e d\u2019un mur perc\u00e9 de deux \u00e9troites fen\u00eatres. Elle s\u2019ouvrait au contraire sur l\u2019int\u00e9rieur de la chapelle par un grand arc bris\u00e9 et seul une claie de bois prot\u00e9geait le sanctuaire. Ce dispositif fermait l\u2019acc\u00e8s du sanctuaire aux b\u00eates sauvages ou domestiques, tout en permettant aux voyageurs d\u2019admirer l\u2019ensemble de sa d\u00e9coration. On retrouve ce type de fermeture \u00e0 claire-voie dans nombre de chapelles du bord des routes, par exemple dans celles de Luc\u00e9ram dans le comt\u00e9 de Nice. Au-dessus de cet arc largement ouvert avait \u00e9t\u00e9 peints deux saints protecteurs contre la peste, saint Roch et saint S\u00e9bastien, devenus aujourd\u2019hui bien difficiles \u00e0 voir, car ils furent recouverts au XVII\u00e8me si\u00e8cle d\u2019une Annonciation baroque.
\nL\u2019int\u00e9rieur :
\nC\u2019est \u00e0 la m\u00eame \u00e9poque que l\u2019on recouvrit toute la d\u00e9coration peinte au Moyen Age d\u2019un enduit blanc, ne laissant pour unique d\u00e9coration que la peinture baroque qui domine l\u2019autel : une Madonne encadr\u00e9e par St Pierre et St Paul. Il est probable que cette peinture baroque n\u2019a fait que reprendre le th\u00e8me de la peinture murale d\u2019origine : celui d\u2019une Vierge portant l\u2019Enfant- J\u00e9sus. D\u2019ailleurs, \u00e0 droite, la peinture murale figurait trois saints. On reconnait St Pierre et St Paul. Certes, le troisi\u00e8me personnage a disparu. Il est cependant identifiable gr\u00e2ce au panneau de gauche, qui repr\u00e9sente un cardinal en pri\u00e8re. Les armoiries figur\u00e9es sous son chapeau de cardinal permettent de dire qu\u2019il s\u2019agit \u00e0 coup s\u00fbr de Saint Pierre de Luxembourg. Ainsi, c\u2019est \u00e0 deux saints Pierre et non \u00e0 un seul qu\u2019\u00e9tait d\u00e9di\u00e9e la chapelle \u00e0 l\u2019origine. A cette double d\u00e9dicace, on peut ajouter la Vierge, car, si l\u2019on se retourne en arri\u00e8re, on peut constater que l\u2019arc primitif de l\u2019entr\u00e9e, tr\u00e8s visible, \u00e9tait surmont\u00e9 d\u2019une Annonciation.
\nLe mur de gauche \u00e9tait enti\u00e8rement porteur d\u2019un cycle consacr\u00e9 \u00e0 l\u2019enfance du Christ.
\n– En haut, l\u2019Adoration des bergers.
\n– En dessous, \u00e0 gauche, dans un d\u00e9cor presque identique, l\u2019Adoration des rois Mages
\n– En dessous, sur la droite, la pr\u00e9sentation de J\u00e9sus au Temple. Le cycle du mur de droite, beaucoup plus ab\u00eem\u00e9, est infiniment plus difficile \u00e0 interpr\u00e9ter.
\n– Certains y voient un cycle consacr\u00e9 \u00e0 Saint Martin. Le panneau du haut, bien conserv\u00e9, figurerait la rencontre avec un pauvre; celui de dessous, \u00e0 gauche, repr\u00e9senterait le partage du manteau (mais cette sc\u00e8ne est tr\u00e8s effac\u00e9e) tandis que dans celui de droite, St Martin se convertirait et renoncerait \u00e0 ses armes.<\/p>\n
– D\u2019autres pensent qu\u2019il s\u2019agit d\u2019\u00e9pisodes de la vie de Saint Fran\u00e7ois d\u2019Assise. En haut, St Fran\u00e7ois rencontre un pauvre chevalier, avec lequel il \u00e9change ses v\u00eatements. En dessous, il s\u2019agirait du c\u00e9l\u00e8bre baiser de Saint Fran\u00e7ois au l\u00e9preux (\u00e0 gauche) et de l\u2019\u00e9pisode o\u00f9 saint Fran\u00e7ois rend \u00e0 son p\u00e8re l\u2019argent qu\u2019il lui avait d\u00e9rob\u00e9 pour r\u00e9parer des \u00e9glises, et o\u00f9 il se d\u00e9nude pour lui rendre jusqu\u2019\u00e0 ses v\u00eatements.
\nEnfin, les quatre parties de la vo\u00fbte sont d\u00e9di\u00e9es aux quatre Docteurs de l\u2019Eglise, qui remplacent ici les Evang\u00e9listes.<\/p>\n
La danse macabre C\u2019est sans contexte ce th\u00e8me iconographique qui donne \u00e0 la chapelle Saint Pierre de Macra son originalit\u00e9. Sa facture diff\u00e9rente, moins \u00e9labor\u00e9e, permet d\u2019affirmer que cette danse macabre fut peint par un autre artiste, sans doute d\u2019origine locale. Tous les panneaux qui composent cette fresque ne sont pas lisibles. On reconnait n\u00e9anmoins les couples suivants :
\n– le Pape (presque effac\u00e9) a les mains jointes comme en pri\u00e8re, tandis qu\u2019un mort lui soul\u00e8ve son manteau. \u201cVenes avant\u201d (Venez avant)lui dit le premier mort tandis que le texte suivant affirme : \u201cEllas ensi grant honor cum si tost se perd\u201d (H\u00e9las, ainsi, les plus grands honneurs, comme tout, se perdent)
\n– et l\u2019Empereur vient ensuite, et est beaucoup plus facile \u00e0 identifier. Il porte certes une couronne, mais surtout l\u2019\u00e9p\u00e9e au c\u00f4t\u00e9 et l\u2019\u00e9cu avec l\u2019aigle imp\u00e9rial. \u201cVenes avant emperor mort nesparmie petit ne grant\u201d (venez, Empereur, la mort n\u2019\u00e9pargne ni les petits, ni les grands). Et rien ne sert de regarder<\/p>\n
La danse macabre : l\u2019Empereur en arri\u00e8re : \u201cEllas je (ne) sae cum fuir ni ond fuir\u201d (H\u00e9las, je ne sais ni ou, ni comment fuir).
\n– Le Cardinal et le Roi. Si le premier est bien visible, le second, en pourpoint vert, est plus difficile \u00e0 identifier. \u201cAy las e me faut morir, jamae ne porteraye plus ne vayre ne gris\u201d.
\n– l\u2019Ev\u00eaque et le Seigneur. Le squelette dress\u00e9 sur ses \u00e9chasses tire un \u00e9v\u00eaque facile \u00e0 reconna\u00eetre, avec sa mitre et sa crosse \u00e9piscopale. Il lui dit : \u201cfetenez avant, evesque jamays no intrere en chambra pente\u201d (venez, \u00e9v\u00eaque, jamais, vous n\u2019entrerez plus dans une chambre d\u00e9cor\u00e9e), \u201cla mort meyna guerra dorendevant\u201d (la mort m\u00e8ne guerre d\u00e9sormais). Le seigneur, arm\u00e9 et casqu\u00e9, essaie de lever son \u00e9p\u00e9e contre le mort qui lui attrape la main. Un mort semble lui r\u00e9pondre : \u201cvenes ensi connestable mais amb la mort venres en ifert\u201d (venez enfin, conn\u00e9table, mais avec la mort, vous irez en enfer).
\n– le moine noir, l\u2019usurier et la prostitu\u00e9e. C\u2019est un abb\u00e9 b\u00e9n\u00e9dictin, avec sa crosse abbatiale qui dit : \u201cla mort me trais et fort me lige. Diu aye pietat de my\u201d (la mort me tire et fort me lie. Dieu, aie piti\u00e9 de moi !). Ce que dit le mort \u00e0 l\u2019usurier est effac\u00e9, mais ce dernier r\u00e9pond : \u201cTenes mort mon argent e vos me laissez aler coma devant\u201d ((tenez, mort, mon argent, et laisser moi aller comme avant). Suit une femme aux seins tombants et dont les visc\u00e8res sortent du ventre (ses chaussures donnent \u00e0 penser qu\u2019il s\u2019agit d\u2019une prostitu\u00e9e). Elle dit \u00e0 son pr\u00e9decesseur : \u201cVen\u00e9 usurier vos perdere la via a labisme ifernal me tere compagnia\u201d (venez, usurier, vous avez perdu le droit chemin et \u00e0 l\u2019ab\u00eeme infernal vous me tiendrez compagnie).
\n– le moine cordelier et le marchand. Le moine franciscain ne vaut gu\u00e8re mieux que son homologue b\u00e9n\u00e9dictin. \u201cVos n\u2019avez fet Santa via com la femma de pareya vous esterez en compagnia\u201d (Vous n\u2019avez fait sainte voie, avec la prostitu\u00e9e vous serez en compagnie). Quant au marchand, il se lamente : \u201cJe e stayt amont e aval a pie e a chaval…ellas on…torner…jamays\u201d (j\u2019ai \u00e9t\u00e9 par monts et par vaux \u00e0 pied et \u00e0 cheval, h\u00e9las, ne reviendrai jamais).
\n– le laboureur. C\u2019est cet ultime personnage qui donne tout son sens \u00e0 la danse macabre. En effet, sa vie de labeur et de pauvret\u00e9 fait pour lui de la mort une d\u00e9livrance et non une trag\u00e9die. \u201cvenes lavor vous avez tant lavore noit ne jor vous ne vous etes repos\u00e9\u201d (venez, laboureur, vous avez tant travaill\u00e9 : ni nuit ni jour vous ne vous \u00eates repos\u00e9). La danse macabre est un th\u00e8me qui apparait en France dans la seconde moiti\u00e9 du XIV\u00e8me si\u00e8cle, celui de la guerre de cent ans et de la grande peste noire de 1348, au terme desquelles la population europ\u00e9enne avait diminu\u00e9 presque de moiti\u00e9 (on estime le bilan global \u00e0 40 millions de morts). En 1376, le po\u00e8me du Respit de la Mort recourt pour la premi\u00e8re fois \u00e0 cette image de la danse :
\n\u201cJe fis de Macabr\u00e9 la danse qui toutes gens maine \u00e0 sa tresche et a la fosse les adresche qui leur est derraine maison\u201d.
\nEn 1424, ce th\u00e8me est peint \u00e0 Paris sur un mur du cimeti\u00e8re des Innocents. En 1485, il est repris et diffus\u00e9 \u00e0 travers une s\u00e9rie de 23 gravures r\u00e9alis\u00e9es par Guyot Marchand. La danse macabre ne cesse alors de s\u2019enrichir : par les textes et les dialogues (tant et si bien qu\u2019en 1449, le duc de Bourgogne en fait donner une repr\u00e9sentation th\u00e9atrale \u00e0 Bruges), comme par le nombre des personnages (en 1491 une seconde s\u00e9rie de gravures ajoute 36 personnages f\u00e9minins aux 40 personnages masculins de l\u2019\u00e9dition d\u2019origine). La danse se r\u00e9pand dans toute l\u2019Europe, se confrontant \u00e0 d\u2019autres th\u00e8mes macabres comme la Rencontre des Trois Morts et des Trois Vifs, sans doute d\u2019origine italienne. Sa pr\u00e9sence \u00e0 Macra \u00e0 la fin du XIV\u00e8me si\u00e8cle n\u2019a donc rien d\u2019\u00e9tonnant. Elle t\u00e9moigne cependant \u00e0 quel point le Pi\u00e9mont est encore \u00e0 cette date soumis \u00e0 l\u2019influence de la culture fran\u00e7aise. Certes, la danse macabre n\u2019est ici repr\u00e9sent\u00e9e que dans une version tr\u00e8s simplifi\u00e9e, mais la langue dans laquelle s\u2019expriment les personnages – m\u00e9lange d\u2019occitan et defran\u00e7ais – illustre mieux que tout comment le peintre de Macra a cherch\u00e9 \u00e0 adapter pour une humble vall\u00e9e occitane un mod\u00e8le savant venu de France.<\/p>\n","modified":"2020-04-30T10:14:33","color":"","icon":"","noDetails":false,"noInteraction":false,"image":"http:\/\/grandangle.be.webmapp.it\/wp-content\/uploads\/2020\/04\/chiasa-macra-300x200.jpg","taxonomy":{"webmapp_category":[346]},"accessibility":{"mobility":{"check":false,"description":""},"hearing":{"check":false,"description":""},"vision":{"check":false,"description":""},"cognitive":{"check":false,"description":""},"food":{"check":false,"description":""}},"locale":"fr","source":"http:\/\/grandangle.be.webmapp.it\/wp-json\/wp\/v2\/poi\/10888","wp_edit":"http:\/\/grandangle.be.webmapp.it\/wp-admin\/post.php?post=10888&action=edit","web":"http:\/\/grandangle.be.webmapp.it\/poi\/chiesa-di-san-pietro\/","addr:street":"","addr:housenumber":"","addr:postcode":"","addr:city":"","contact:phone":"","contact:email":"","opening_hours":"","capacity":""},"geometry":{"type":"Point","coordinates":[7.187382799999999,44.49964660000001]}}